“World War Z” : le réalisateur nous répond ! [INTERVIEW]
Rencontre avec le réalisateur Marc Forster, général en chef de la guerre mondiale des zombies au cœur de “World War Z”, librement inspiré du best-seller de Max Brooks.
© Paramount Pictures / Plan B Entertainment / Skydance Productions
23 mars 2013. Studios Paramount. Une vingtaine de journalistes internationaux est réunie pour découvrir les premières images de World War Z et s’entretenir avec son réalisateur, Marc Forster. Alors que chacun s’apprête à mettre ses lunettes 3D, surprise, Brad Pitt s’invite à la fête. Le producteur et acteur principal du long métrage explique, rieur, avoir fait ce film pour ses enfants, afin “qu’ils puissent le voir avant qu’ils ne soient trop grands”. Ce film est un pari poursuit-il et “un défi car ce ne fut pas simple d’adapter un roman aussi riche que celui de Max Brooks. Mais avec beaucoup de travail et la talent de Marc Forster, je crois que nous y sommes arrivés. Ce fut un tournage épique aux quatre coins du monde, et j’ai réussi à y survivre!”. Brad invite alors chacun à mettre ses lunettes, destination la planète zombie.
Au programme, la nouvelle bande-annonce du film suivie d’un promo-reel d’une dizaine de minutes proposant des images de l’attaque de Philadelphie, la fuite de Brad/Gerry et sa famille, l’arrivée sur un porte-avions refuge, le départ pour Jérusalem où une armée de zombies déferle sur un mur d’enceinte et la fuite de Brad Pitt en avion. Fin de séquence, où se sont mêlés action, tension, rythme effréné, montage cut, plans gores (morsures, chairs arrachées, bras coupés…) mais aussi des séquences plus intimes autour du personnage principal. Il est temps pour le réalisateur de répondre à nos questions.
© Paramount Pictures / Plan B Entertainment / Skydance Productions
En quoi cette adaptation reste t-elle fidèle au roman de Max Brooks… et en quoi avez-vous pris des libertés ?
Marc Forster : Le roman n’avait pas vraiment été pensé pour une narration visuelle. Nous avons donc recréé une histoire qui fonctionne à l’écran, tout en conservant l’esprit du livre. J’ai beaucoup discuté avec Max Brooks et il m’a fait confiance pour faire ce qu’il fallait pour raconter cette histoire au cinéma.
Le film se concentre t-il uniquement sur le personnage de Brad Pitt ? Ou développez-vous plusieurs personnages et plusieurs histoires comme dans le roman ?
C’est vrai que dans les images qui ont été dévoilées pour le moment, le film semble uniquement se foculiser sur le personnage de Brad mais ce n’est PAS le cas. Vous ne les avez pas encore vus mais il y a beaucoup d’autres personnages. Ce sont des personnages-clés dans les différents endroits où Brad se rend, comme en Israël par exemple.
© Paramount Pictures / Plan B Entertainment / Skydance Productions
Parlez-nous des différents lieux de tournage justement…
Tout le monde a été très accueillant, où que nous allions, et nous avons pu tourner tout ce dont nous avions besoin pour ce projet ambitieux. Et avec Brad Pitt à bord, ça vous ouvre des portes. Dans les images, vous avez vu les Etats-Unis et Philadelphie, et Israël. Mais le film se déroule également en Corée du Sud et dans certaines parties du Pays de Galles.
Quels sont les sous-thèmes de ce film ? On a l’impression que ça parle de ceux qui ont tout et ceux qui n’ont rien, des riches et des pauvres…
Les films de zombies sortent souvent durant des périodes de changements. Dans les années 70, il s’agissait d’évolutions sociales et économiques. Et nous vivons de nouveaux changements actuellement. Il y a des signes partout, les choses changent en profondeur et c’est pour cette raison que les films de zombies sont particulièrement bien adaptés à l’époque actuelle. Un changement apporte souvent des choses positives, et je reste optimiste quant à notre avenir. Mais pour beaucoup de gens, le changement fait peur. C’est ce qu’on peut encore constater aujourd’hui.
© Paramount Pictures / Plan B Entertainment / Skydance Productions
Quelle a été votre approche des zombies ?
Je voulais absolument être le plus réaliste et plausible possible. Comme si cela pouvait vraiment arriver. Et en même temps, j’adore les films de George Romero… A l’époque, c’était une métaphore du consumérisme, alors que nos zombies ont ici une approche plus biologique. Ils sont comme des fourmis, et c’est pour cette raison que nous avons développé cette séquence où les zombies forment une pile pour atteindre le sommet de l’enceinte à Jérusalem. Aujourd’hui, la Terre est surpeuplée et d’ici 2050, nous serons 15 milliards : notre film veut montrer ce qu’il advient quand la société humaine s’effondre à cause de la surpopulation, du manque de ressources et d’une épidémie virale. Vous verrez nos zombies se comporter comme un tsunami, car ils sont en pleine frénésie alimentaire, à la recherche du peu de nourriture subsistant. C’est un film très “organique”, que nous avons développé en observant la nature et en impliquant des spécialistes.
D’après ce que nous avons pu voir aujourd’hui, il faut 12 secondes pour qu’un humain se transforme en zombie. Pourquoi 12 et pas… 10 par exemple ?
Nous en avons longtemps discuté. Et pour tout vous dire, ce n’est pas toujours 12 secondes. Vous verrez que dans certaines parties du monde, il faut plus de temps pour qu’un humain se transforme. Mais en général ça arrive en 12 secondes, un timing qui nous semble fonctionner au niveau dramatique pour le film.
© Paramount Pictures / Plan B Entertainment / Skydance Productions
Le film semble très réaliste dans son approche d’une pandémie…
Effectivement. Je pense que notre film est effrayant dans le sens où cela pourrait vraiment arriver. C’est effrayant de se dire qu’un nouveau virus pourrait effectivement transformer l’essentiel de la population en “zombie”. Et peut-être que, comme dans le film, nous ne saurions pas comment riposter et nous défendre. Pour moi, c’était important de traiter cette peur et je tenais à focaliser le récit là-dessus. Dans cette optique, nous avons parlé avec beaucoup de conseillers pour être les plus réalistes possible.
Les zombies seront-ils tous rapides et tous en images de synthèse ?
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Non, non pas du tout ! Il y aura des zombies maquillés et des zombies plus lents. Nous avons plein de surprises pour vous.
Il y a un vrai débat chez les fans autour de la vitesse des zombies : beaucoup de gens n’aiment pas les zombies rapides…
C’est une bonne question mais en même temps… qu’en savons-nous ? Avez-vous déjà rencontré un zombie ? C’est donc un débat très ouvert. Et je comprends les arguments des deux parties. Et encore une fois, vous verrez dans notre film des zombies rapides et des zombies lents et vous comprendrez pourquoi certains sont rapides et pourquoi certains sont lents. Vous en apprendrez plus sur eux. Après à vous de choisir : en ce qui me concerne, j’aime les deux types de zombies.
Max Brooks préfère les zombies lents, non ?
C’est vrai, et je lui ai expliqué ma théorie selon laquelle certains zombies pourraient être rapides. Nous en avons parlé ensemble, et je lui montrerai le film très bientôt. Comme je le disais, les zombies sont inspirés de la nature et de la biologie, et l’idée est de les rapprocher des fourmis. C’est pour cette raison que vous verrez un tsunami de zombies et une pile de zombies déferler sur Israël.
© Paramount Pictures / Plan B Entertainment / Skydance Productions
Comment Brad Pitt a t-il rejoint le projet ?
Sa société de production, Plan B, avait acquis les droits du roman et avait commencé à développer le projet. Brad est donc producteur et quand j’ai rejoint le film, il y avait déjà un scénario que j’ai continué à développer avec lui. C’est une star tellement iconique. Je voulais travailler avec lui depuis longtemps et ça a été une grande collaboration.
Il y a pourtant eu des rumeurs concernant des problèmes, des tensions, des reshoots…
Quand vous gérez une telle production, avec 1200 à 1500 figurants sur trois semaines d’affilée aux quatre coins du monde, c’est forcément très éprouvant et il y a forcément des tensions, parfois difficiles à gérer. Mais c’est sincèrement mensonger de dire qu’il y a eu une coupure et une rupture de communication entre nous. Nous avons retourné des scènes avec l’appui du studio, car cela nous semblait être une meilleure conclusion pour le film. Nous avons donc décalé la sortie et organisé ces prises additionnelles en accord, sachant que le film nous semblait finalement plus être un blockbuster estival qu’une sortie hivernale. C’est vraiment lors du premier bout-à-bout que nous avons pris conscience qu’il nous fallait une meilleure fin. C’est donc faux de croire que ce fut une production “à problèmes”. Nous n’avons pas non plus lancé un tournage précipité comme cela a été dit. Sur un film de cette ampleur, vous ne pouvez évidemment pas être totalement préparé, mais nous avons bouclé le tournage dans le temps et le budget. Tout a bien fonctionné au final, et j’ai une vraie confiance dans ce projet. Nous avons pu avoir plus de temps pour peaufiner les effets visuels, et tant mieux car ils occupent une part importante du récit. Encore une fois, nous aurions pu sortir le film en décembre, mais c’était vraiment préférable d’attendre comme nous l’avons fait.
Nous avons entendu parler d’une saisie de fausses armes à Budapest durant le tournage. Qu’en est-il ?
C’est exact, il s’agissait de véritables armes transformées pour le cinéma, que nous avons fait transporter d’Angleterre vers Budapest. La police a intercepté le chargement et convoqué la presse et quand ils ont pris conscience de leur erreur, ils ont abandonné les poursuites et nous ont rendu nos “fausses vraies armes” !
© Paramount Pictures / Plan B Entertainment / Skydance Productions
Etait-ce compliqué d’appréhender les effets visuels et la gestion de milliers de figurants ?
Ce que j’aime sur ce projet, c’est que c’est un film centré sur les personnages et plus particulièrement celui de Brad. Il incarne un héros de tous les jours qui tente d’aider autour de lui et de sauver sa famille. J’ai adoré travailler sur les effets visuels, car ça apporte beaucoup au film : j’ai vraiment apprécié d’avoir ces outils à ma disposition pour servir le récit.
En quoi votre expérience bondienne sur “Quantum of Solace” vous a t-elle aidé ?
Ca m’a aidé à développer encore plus l’envergure de World War Z. Ca vous donne la confiance nécessaire pour gérer un projet de cette ampleur et tourner dans différents pays, comme ce fut le cas sur Quantum Of Solace. Ca m’a appris à gérer un plateau avec plusieurs centaines de personnes, plusieurs caméras et énormément de figurants. Chaque film vous fait grandir et vous apprend beaucoup de choses en tant que réalisateur.
Y a t-il une scène en particulier qui a représenté un challenge ?
Tourner semaine après semaine avec 1200 figurants et plusieurs caméras c’est épuisant… et je ne rêve que d’une chose à l’heure où je vous parle : tourner avec quatre personnes une scène de dîner ! Nous avions vraiment besoin de faire tourner physiquement tous ces gens, car Brad se retrouve au milieu d’eux et vous avez besoin de voir une interaction entre lui et de vrais humains et non pas des images de synthèse. Il devait être au coeur de la foule.
© Paramount Pictures / Plan B Entertainment / Skydance Productions
Le comédien français Gregory Fitoussi est au générique du film !
Oui, Grégory est un comédien solide, qui incarne un pilote des Nations Unies dans notre film. Il transporte Brad Pitt dans un avion militaire depuis le milieu de l’océan, où les humains sont en sécurité, jusqu’en Corée du Sud puis en Israël. C’est l’un des seconds rôles de notre film, et c’était un plaisir de travailler avec lui.
Comment gérez-vous la classification ? Difficile de faire un film de zombies et en même temps un blockbuster estival…
Le but a toujours été d’obtenir une classification PG-13 (déconseillé aux moins de 13 ans), donc ce ne sera pas un film ultra-sanglant. Mais je pense que les fans trouveront leur compte dans l’action et la tension.
De prime abord, le film semble destiné à un public assez masculin. Pensez-vous pouvoir intéresser le public féminin ?
Absolument ! Déjà parce qu’on parle d’un film avec Brad Pitt ! Mais c’est surtout un film pour tout le monde, l’histoire d’une épidémie mondiale qui peut amener chacun à s’identifier. Nous avons tous en chacun de nous des peurs liées à la vie et à la mort, et ce genre de spectacle a donc une résonnance chez chacun. Hommes comme femmes.
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Peut-on s’attendre à une trilogie “World War Z” comme cela a été un temps annoncé ?
Difficile à dire… Nous allons déjà voir l’accueil réservé à ce premier film et nous verrons ensuite. Je ne sais vraiment pas comment les choses vont évoluer.
Vous disiez avoir tourné une autre fin : qu’est-ce que la première avait de décevant ?
Elle n’était pas assez personnelle. L’enjeu plus personnel rend la nouvelle fin plus intéressante. Quand je regarde la fin d’un film, je veux ressentir une connexion personnelle et je crois que la connection entre le personnage de Brad et les zombies est beaucoup mieux définie dans notre nouveau dénouement.
Propos recueillis par Emmanuel Itier à Los Angeles le 22/03/2013
World War Z