Richard et Romane Bohringer, leur hymne à la vie

Sur la scène du Théâtre de l’Atelier, à Paris, père et fille prolongent leur tête-à-tête intimiste avec J’avais un beau ballon rouge. Un acte d’amour.

« Aujourd’hui, je suis un ‘rémissionnaire’ en permission ! » Cette voix de rocaille reconnaissable au premier mot, cet humour qui souvent vient fracasser la gravité d’une réalité, comme une ultime pirouette, tout Richard Bohringer est là.

Derrière le micro de Marc-Olivier Fogiel, sur RTL, l’un des acteurs préférés des Français revient sur ce fichu crabe qui lui en a donné – et lui en donne – à voir. « J’ai failli mourir d’un lymphome du système nerveux central », a-t-il expliqué, avant d’ajouter : « La mort a rôdé, s’est même plus ou moins arrêtée […] Depuis, je vais comme des milliers de femmes et d’hommes en rémission, avec ce drôle de truc au-dessus de la tête, cette épée de Damoclès, comme on dit. » Tous les trois mois, c’est le protocole, un contrôle hospitalier vient en effet rappeler qu’on en n’a pas tout à fait fini.

Mais quand Richard retrouve la scène, sa fille et ce public qui ne l’a jamais abandonné, le bras de fer gagne du côté de la vie. « Monter sur scène avec lui, après cette année éprouvante, c’était bouleversant ! Il est magnifique, vaillant et courageux », a lâché Romane à l’un de nos confrères.

Le « faire ensemble » est un cadeau que ces deux-là ont décidé de s’offrir. Cela faisait longtemps en effet que la comédienne avait envie de partager une scène de théâtre avec son père – ensemble, ils n’ont tourné que deux films en vingt ans. Mais pas n’importe quoi. Elle voulait du sens.

Un jour, le metteur en scène Michel Didym lui suggère J’avais un beau ballon rouge. La pièce revient sur l’histoire de Margherita Cagol, future compagne de Renato Curcio, fondateur des Brigades Rouges, que son père tente de ramener à la raison. D’un côté, une jeune femme révoltée, dont la soif d’absolu va jusqu’à l’intransigeance. De l’autre, un homme taiseux, tendre et pétri d’un bon sens conservateur. Seul point commun peut-être entre la fiction et leur vie, la tendresse. Pour le reste, la pièce serait plutôt un miroir inversé, car à la ville, l’acteur tiendrait davantage de l’homme emporté, fiévreux, un concentré de colères contre les injustices, le pouvoir, pris dans ses tourments intérieurs. Elle, plus mesurée, plus douce, avec un côté quasi protecteur quand son regard se pose sur ce paternel hors norme.

Jusqu’à l’âge de neuf ans, jusqu’à ce que Richard Bohringer rencontre sa femme actuelle et fonde un nouveau foyer, Romane a été élevée par lui. Une enfance en tête à tête dont elle garde peu de souvenirs, si ce n’est le fait qu’ils vivaient au jour le jour, parce que n’étant pas encore célèbre, le comédien galérait beaucoup. « C’était un homme en souffrance, très déconstruit », a-t-elle confié lors d’un entretien accordé à Paris Match, en 2013. « Quelque chose en moi ne voulait pas le contrarier. Je voulais lui faire croire que tout allait bien. C’est pourquoi j’ai tu beaucoup de mes peines, de mes doutes, de mes manques. C’était ma façon de le protéger et j’ai appris à avancer comme cela, en n’exprimant que le bon. Et ce que je me suis imposé est devenu ma personnalité. Je suis devenue une femme heureuse, qui aime le sourire. »

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Comme en écho, les mots de Bohringer au micro de RTL : « Quand on sait à quel point ce que l’on a est grave, il y a une prise de conscience de ce qu’on a été qui désole un peu. Je n’ai pas tout le temps été ce que j’aurais voulu. A force d’être brut de décoffrage, on est brut tout court. » Et celui qui se grisait d’être « parcoureur de savanes », « enjambeur d’océans », s’est rassemblé au plus près des siens. « Je profite un peu mieux de mes gosses, de leur mère, beaucoup mieux même, je suis entièrement dévoué à cette cause. » Chaque soir, au Théâtre de l’Atelier, les nombreux « Papa » prononcés par Romane sont autant de petits mots d’amour. Tout comme les applaudissements chaleureux des spectateurs. Car si Richard remonte sur scène pour vivre, « pour ne pas lâcher le morceau », comme il dit, son public non plus ne lâche rien.

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